Mais qu’est-ce que le « boutis » ?
Cette broderie en relief consiste à introduire une mèche de coton entre deux pièces de batiste, de coton ou de lin, superposées et réunies par de petits points avant ou de petits points de piqûre en suivant le dessin tracé sur la première étoffe. Une fois les motifs sertis, le travail s’effectue sur l’envers : à l’aide d’une aiguille à tapisserie, le coton de méchage est glissé dans les motifs délimités par le sertissage afin de leur donner le volume désiré.
Le boutis existe à Marseille depuis le 13ème siècle où il s’est implanté grâce à des brodeuses arrivées de Sicile qui transmettent leur savoir-faire aux Provençales. En 1686, Louis XIV et Colbert, afin de protéger les manufactures textiles françaises, promulguent un arrêt du Conseil d’Etat du Roi interdisant l’importation des Indiennes, “toiles de coton peintes aux Indes ou contrefaites dans le royaume”. Ce qui laisse aux créations en boutis le champ libre pour se développer. Jusqu’en 1765, le corps des brodeurs de Marseille bénéficie d’un monopole qu’il exerce dans des ateliers royaux, probablement situés autour du Vieux-Port. “La piqûre de Marseille ou broderie de Marseille” connaît alors un très vif succès et les ateliers, qui peuvent employer jusqu’à 300 personnes, exportent leurs pièces dans toutes les cours d’Europe et jusque dans les îles. Lorsque le monopole tombe, le boutis entre dans le domaine public où il est simplifié et prend le nom de “broderie emboutie”.
Le point de piqûre est abandonné au profit du point avant, plus rapide et plus économique, et les motifs sont davantage bourrés. Puis, jusqu’à la première guerre mondiale, le boutis est pratiqué par les femmes des pêcheurs de Cassis ou de La Ciotat ainsi que par quelques artisans indépendants qui fournissent la bourgeoisie marseillaise.
Disparue à la fin du 19ème siècle, cette technique est récemment ressortie des armoires et des greniers grâce à la curiosité de quelques passionnées. De nos jours, elle reprend ses droits, évolue vers la modernité et occupe une place de choix parmi les arts textiles les plus reconnus.